Digressions polémiques sur les volumes excessifs dans la presse.
Imaginez. Vous êtes dans la cuisine et vous entendez la radio dans la presse d’à côté. Débit intense, interminable, doublement, triplement incompréhensible. Longuement insensé.
Le futur lecteur d’un Écho du travail est pris, lui aussi dans ses préoccupations du moment. Comment capter son attention ?
Imaginez un cas : vous apercevez dans votre Écho du travail préféré un bloc de quatre pages particulièrement denses. Il s’agit d’un « compte redu » d’une réunion consacrée aux droits des femmes.
Que vous soyez une lectrice ou un lecteur, vous pouvez vous demander, si vous êtes d’humeur espiègle, si la consigne donnée aux rédacteurs était d’affirmer une résistance à ce qu’impose le patriarcat depuis des millénaires et de refuser toute idée de séduction, de cette séduction sempiternellement associée à la femme. Dans ce cas, l’objectif a été atteint et les quatre pages sont d’une austérité parfaitement spartiate.
Autre hypothèse. Il a été demandé aux rédacteurs de suivre l’injonction du directeur de Temps, le prestigieux prédécesseur du Monde : « Faites chiant ! ». Et donc éliminez tout ce qui pourrait donner du relief à votre papier, toute couleur locale, tout ce qui pourrait s’apparenter à un lyrisme bon pour les midinettes. Si le papier est trop long pour l’espace qui lui a été imparti, tant mieux ! Les secrétaires de rédaction ne seront pas tentés de donner du volume à la titraille. C’est encore plus valable si le papier est intéressant et s’il est constitué de témoignages émouvants. La masse du texte les étouffera et endormira le lecteur.
Encore une supposition. Peut-être fallait-il prouver que, malgré l’aspect sandwich au pain de ces pages, les diffuseurs à la criée seraient capables de vendre le journal encore mieux qu’avant ?
Un quasi contre-exemple

6 décembre 2020
pp. 2 et 3
C’est sans doute parce que c’est un sujet d’ouverture et parce qu’il est supposé, à juste titre, très porteur, qu’il occupe un si fort volume en pratiquement une seule interview. Environ seize mille signes dont mille pour un deuxième papier et mille deux cents pour un encadré. Le Journal du Dimanche (6 décembre 2020) fait un pari, celui de tendre vers les journaux du week end à fort volume de la presse allemande et anglo-saxonne. D’ailleurs, le numéro de cette semaine-là fait soixante pages.
Cependant, pour un journal populaire, c’est bien trop long et massif. D’ailleurs, le JDD a pris soin d’aérer l’interview par deux exergues et seize questions qui, graphiquement, s’apparentent à des inters.
Habituel mais utile à remarquer, les têtières, le surtitre et le titre qui se compètent sans réelle redondance.