
Et si le Nombre 12 rend l’idée de la Nature à son point d’expansion parfaite, d’intégrale maturité, c’est qu’il contient trois fois le cycle entier des choses, que l’on représente par 4 ; 4 étant le chiffre de l’accomplissement dans l’abstrait ou de la croix dans le cercle, et des 4 points ou nœuds de la vibration magnétique par lesquels tout ce qui est doit passer ; et 3 est ce triangle qui aspire trois fois le cercle, le cercle qui contient 4 et le régente par la Triade, qui est le premier module, la première effigie ou la première image de la séparation de l’unité.
Tous ces états ou nœuds, tous ces points, ces degrés de la grande vibration cosmique sont reliés entre eux et ils se commandent.
Mais si 3, pur ou abstrait, demeure fixé dans le principe, 4 tout seul tombe dans le sensible où tourne l’âme, et 12 dans la réalité qu’on piétine, et où il faut se battre pour manger, mais sans manger.
Car si 12 rend possible la guerre, il ne la fait pas encore naître, et 12, c’est la possibilité de la guerre, la tantalisation de la guerre sans guerre, et il y a du 12 dans le cas de Tentale, dans cette peinture des forces stables, mais hostiles, puisque opposables, et qui ne peuvent pas encore se manger.
Antonin Artaud
Héliogabale ou l’Anarchiste couronné
Gallimard – L’imaginaire
p. 62