
Quand La nuit des rois a pris fin, quand la scène s’est vidée derrière son rideau, le spectacle s’est implanté dans les mémoires.
Le 27 septembre 2003, Shakespeare a renforcé son règne sur les âmes de parisiens attirés à la Comédie Française par les fastes pleins de bruit et de fureur de la tragédie anglaise.
Combien de générations de spectateurs ont contemplé ici les profondeurs de l’âme humaine ? Des passions mises en scène, portées à la surface sensible, au rire et aux pleurs, par la poésie dramatique.
Une aire vaste, tissée des mille liens et d’autant de nœuds, un réseau qui laisse deviner ce qui vit au-dessous, le labyrinthe foisonnant des fils d’Ariane d’une humanité amoureuse de ses origines. Œdipe, Phèdre et les Atrides vous observent d’ici pendant que vous croyez assister à leurs déchirements éternels. Sous le vernis des civilités coagulées par des siècles d’apparences, coule la source rouge des désirs et des vengeances.

Une jeune femme et son ombre sur les pavés attendent, entre deux actes, étrangères aux alluvions récentes que l’histoire a déposées sur ce sol fertile en allusions.
La tragédie qui se donne cette après-midi prend un autre sens dans le soleil oblique, cadran des heures artificielles de la ville où le spectacle rappelle aux hommes d’où ils viennent.
Colette a vécu près d’ici, dans un appartement du Palais Royal, alors son nom a été donné à la place, connue surtout parce que s’y trouve la Comédie Française. À côté, une autre place porte le nom d’André Malraux, peut-être plus justifié. De là, on prend l’avenue de l’Opéra pour marcher vers le Palais Garnier, un temple de l’architecture Napoléon III. Un Bonaparte et un autre. Sedan et 18 juin. Coups d’État, du 2 décembre 1851, du 13 mai 1958. Coup d’État permenent. Malraux, au ministère de la Culture, comme éternel compagnon de route de tant d’aventures. Parfois de tragédies.
janvier 1948 – mai 2004 – août 2005 – octobre 2019 – février 2023