
La voix « calme et grave » du comédien ; un endroit dont le nom rappelle inévitablement les lieux communs sur Proust et les réminiscences ; cette bicyclette enfin qui roule au rythme des souvenirs et d’un paysage sobre, plus qu’abstrait, tout prépare le spectateur à savourer son propre passé à la lumière de celui que Pérec et Frey lui livrent généreusement.

Au Théâtre de la Madeleine, Sami Frey donnait, le 5 novembre 2003, une des dernières du « je me souviens » de Georges Pérec.
Exploit charmant. Cela existe depuis si longtemps que l’artiste aurait pu se lasser et ne plus revenir prononcer devant nous, dans sa propre mise en scène, ce monologue intérieur qui est l’image même des jeux obscurs de la mémoire. Mais il l’a fait, heureusement.
Et le sablier des souvenirs a pu couler encore, à sa mesure, selon l’esprit du lieu, selon les états d’âme du spectateur, auditeur, rêveur. Irons-nous vers le haïkaï pour savourer son goût de l’ « universelle impermanence » de nos mondes, l’intérieur et l’extérieur ?
Ou alors, ce serait le train des jours selon Musil…